Ce blog a pour vocation l'histoire d'Haussonville, de ses seigneurs et de son village. Des petits bouts d'histoire grappillés ici et là en fonction de mes découvertes et de la documentation que j'aurai pu assembler.

Rendez-vous également sur le blog : en passant par haussonville qui présente des articles sur Haussonville aujourd'hui et sur son territoire.

dimanche 26 avril 2020

La vicomtesse d'Haussonville, modèle du peintre Dominique Ingres


Notre petit réseau WhatsApp, créé à l'occasion du confinement, est l'occasion d'échanges qui peuvent conduire à évoquer l'histoire d'Haussonville et de ses seigneurs...

22 avril ! des cerises bien précoces 
C'est le cas pour ces échanges autour de la photo du cerisier de Michel Demange.

A mon étonnement devant sa précocité, Michel nous donne cette intéressante explication :




"Mes arbres sont directement placés sous la protection des murs du château.... voire même de la Comtesse elle-même que j'eus l'occasion de rencontrer lors d'une balade à New-York. Rencontre où j'ai vanté son élégance, son charme et son doux minois, ce qui me vaut depuis une protection éternelle 😂 ....





Louise de Broglie comtese d'Haussonville
Louise de Broglie - comtesse d'Haussonville
par Jean-Auguste-Dominique Ingres - 1845
Frick Collection - New York


Cette évocation humoristique d'une lointaine descendante des seigneurs du château m'a bien sûr donné envie d'éclairer les très nombreux lecteurs de mes rubriques historiques sur cette charmante personne, qui, lorsqu'on tape "Haussonville" dans un moteur de recherche, jouit effectivement d'une grande notoriété, grâce à Maître Jean-Auguste-Dominique Ingres qui l'a si joliment représentée.

Cherchez dans les images  sur internet, vous trouverez aussi un nombre incalculable de caricatures car cette peinture a beaucoup inspiré. Mon respect pour cette illustre famille qui a tellement accaparé mon temps au cours des dernières années m'empêche de faire figurer ici l'une ces oeuvres artistiques...

Je ne veux pas vous raconter  la biographie de cette grande dame. Wikipédia lui consacre un article très complet que je vous mets en lien. On ne peut pas dire qu'elle n'était pas "bien née" cette Louise Albertine (1818-1882), princesse de Broglie, mariée à Joseph Othenin d'Haussonville qui fut académicien et l'auteur d'une "Histoire du rattachement de la Lorraine à la France" dont un exemplaire dédicacé se trouve encore dans la bibliothèque de notre commune.


Louise est également une ancêtre de Jean d'Haussonville, directeur général du domaine national de Chambord, dont j'ai donné l'arbre généalogique dans un court article que j'ai rédigé à l'occasion de son mariage en 2017.

Louise veille-t-elle sur les cerisiers de Michel Demange ? Les d'Haussonville ont quitté Nancy pour Paris au début du 19e siècle.  Il y a fort à parier qu'elle n'a jamais mis les pieds à Haussonville - Quoique ! Son époux a racheté en 1849 l'Hôtel d'Haussonville à Nancy, pour le sauver de l'abandon par ses propriétaires qui l'avaient négligé.

On dit qu'il était très attaché à la Lorraine. Il possédait encore le château d'Haussonville et de nombreuses terres.



jeudi 2 avril 2020

La vie religieuse à Haussonville du 15e au 20e siècle

Un couvent à Haussonville ?


La campagne électorale a été une chance pour moi ; celle de rencontrer quelques Haussonvillois que je connaissais très peu auparavant. L'un d'eux, en me parlant de l'actuelle "maison d'accueil" l'a citée en l'appelant le "couvent". Il semblerait que c'est ainsi que certains villageois l'appellent. "Mais, il n'y a jamais eu de couvent à Haussonville", lui ai-je dit.

La présence de religieuses de la Doctrine Chrétienne, pendant de longues années, explique sans doute cette appellation, mais cela indique que peu d'Haussonvillois connaissent l'histoire très riche de la vie religieuse à Haussonville.

Je vais tenter d'en faire un résumé ; résumé très sommaire : plus de 500 ans d'histoire en quelques lignes !

On en a une bonne connaissance grâce à l'abbé Paquatte, cité de nombreuses fois dans mes blogs ; Curé de notre village de 1880 à 1891, il y a consacré une importante monographie.

Une collégiale fondée au XVe siècle

Grâce à cet  abbé, on  sait que le seigneur d'Haussonville, Jean et son épouse Irmenson d'Autel ont fondé en 1435, un hôpital de sept lits pour accueillir et soigner les passants et les pélerins  en route vers Saint-Nicolas de Port. Quatre chanoines, avec à leur tête un prévôt, réunis dans une collégiale, la Collégiale Saint-Claude, étaient chargés de l'administration et du service religieux de cet hôpital. Une partie de l'ensemble bâti existait déjà en 1435 ; la partie relative à l'accueil des pélerins comportait une chapelle, mais l'église que nous connaissons ne fut construite qu'après 1440, comme je l'ai découvert dans le testament de Dame Irmenson.

Haussonville - cadastre 1897
Extrait du cadastre de 1897
Ces constructions étaient situées "près du château, à la rue et sur le chemin qui tend, et par lui va à Rosières aux Salines". Le cadastre et les parcelles appelées "l'hôpital" nous donnent une idée de l'endroit où elles se trouvaient.

C'est la guerre de 30 ans (1618-1648) qui a eu raison de l'hôpital qui n'a pas été reconstruit à l'issue de ce conflit. Les bâtiments ont totalement disparu : sans doute ses pierres ont-elles servi à la reconstruction du village qui, lui aussi, a été ravagé.

Le chapitre de chanoines et prévôt a été maintenu jusqu'à la révolution.

vue ancienne sur le choeur de l'Eglise Saint-Claude
Photo Ph. Maurer


L'église construite par les seigneurs  leur était réservée ainsi qu'aux religieux de la collégiale.




Aperçu de l'église de Domptail sur son promontoir
Photo J. Blanchart


L'église paroissiale et le cimetière des habitants d'Haussonville se trouvaient à Domptail-en-l'Air, église-mère.






Où étaient logés chanoines, prévôt et curé ?


L'abbé Paquatte nous fournit de précieuses informations. Les chanoines, s'ils avaient obligation de résidence à Haussonville,  n'ont pas toujours respecté la règle. Ils disposaient néanmoins de trois maisons "au levant de l'église" et le prévôt habitait la plus confortable, celle qui touchait l'église. Nous voilà bien avec l'actuelle maison d'accueil. Lorsqu'un chanoine était aussi le curé de Domptail, il habitait le presbytère de Domptail.

Aperçu de la maison d'accueil
avant travaux du 20e siècle
Photo Ph. Maurer

La maison d'accueil


Cette maison, près de l'église, a dû bénéficier de maintes et maintes modifications car son architecture paraît dater de la fin du 18e siècle.

Elle a profité prioritairement au prévôt de la Collégiale et cela jusqu'à la Révolution, les biens religieux étant alors confisqués pour devenir biens nationaux. Le curé de l'époque et dernier chanoine, M. Lanty, acheta la maison et ses héritiers la vendirent en 1802 à un notable du village, Claude François Thimothée Olry, alors maire du village, qui se rendit propriétaire de l'ensemble des 3 maisons.

A l'arrière de la maison se déroulaient les fêtes patronales



Elle passa ensuite entre les mains de François-Xavier Tétard, maire et orthopédiste renommé (dont j'ai raconté l'histoire) puis de sa nièce Hortense.

En 1911, Hortense vendit la maison à Emile Nicolas, curé de Mont-sur-Meurthe, originaire d'Haussonville, pour servir de presbytère. Effectivement, en 1917, après le décès d'Hortense, le curé Raimbaud s'y installe. Le curé Nicolas mit cette maison à disposition gratuitement.

Je ne dispose que peu d'archives postérieures à cette date. La maison deviendra propriété du Diocèse de Nancy, servira de presbytère et de centre d'accueil pour des retraites ou manifestations religieuses. L'abbé Krémer y laissera de grands souvenirs. Il y restera de 1929 à 1988. J'espérais pouvoir raconter son histoire, mais n'ai pas, à ce jour, collecté suffisamment d'informations.

Dans le recensement de 1936, on observe que deux religieuses habitent à cet endroit : l'une est dite directrice de la garderie, l'autre infirmière. Trois soeurs de la Doctrine Chrétienne s'installeront dans la petite maison à côté de l'église. Les plus anciens des Haussonvillois pourraient nous raconter quelles étaient leurs actions. Pour ma part, j'ai connu Soeur Maxence, chaleureuse et de grande humanité, qui avait assuré la préparation au baptême de notre fille qui avait alors 11 ans. Lorsque j'animais le Café des Femmes, elle avait accepté de nous rejoindre lors de l'une de nos réunions pour nous raconter ses interventions éducatives et sociales auprès des familles défavorisées du Lunévillois.

Quelques années plus tard, alors qu'il n'y avait plus de curé à Haussonville, le Diocèse de Nancy décidait de se séparer de ce patrimoine immobilier lourd à entretenir et vendait les deux maisons à la Commune d'Haussonville. Les religieuses réintégraient leur Maison-mère à Nancy. La "maison des soeurs" devenait maison communale.

Porte de l'ancien presbytère
route de Velle
Photo J. Blanchart

La maison Hinzelin


Après la guerre de trente ans, il n'y avait plus de presbytère à Domptail et le curé Nicolas Gérard a fait construire à ses frais, vers 1720,  un nouveau presbytère à Haussonville. C'est la maison dont j'ai présenté, dans un article précédent, la belle porte dite monumentale.

Le curé Gérard légua, par testament, cette maison à ses successeurs. Elle est restée entre les mains de l'Eglise jusqu'à la Révolution et a fait, comme les autres biens religieux, l'objet d'une confiscation et a été vendue.





L'abbé Paquatte explique clairement les difficultés de la vie religieuse à Haussonville après la Révolution. Il y avait toujours une Eglise, une communauté de croyants importante, mais plus de presbytère. Les curés, sans hébergement, n'y firent que passer.


Le "pavillon" ou "colombier du château"


l'ancien presbytère et son toit à 4 pans
Photo Ph. Maurer
La Commune a cherché à faire construire un nouveau presbytère mais a dû y renoncer faute de moyens. En 1824, pour résoudre ce problème, la Commune parvint à faire un échange de terres qu'elle détenait contre la maison située en face du château qui appartenait au Comte Cléron d'Haussonville. La Commune y engagea des frais importants.

Cette maison resta presbytère jusqu'en 1919, date de sa vente par adjudication à un propriétaire privé, M. Bourdon.Ce qui explique que l'abbé Raimbaud a dû déménager, comme on l'a vu plus haut, pour s'installer dans la maison d'accueil. (voir ci-dessous l'anecdote trouvée après mise en ligne de cet article).

Plus tard, ce joli "pavillon" passera entre les mains de la famille de Philippe Maurer. Elle disposait d'un toit élevé à 4 pans qui malheureusement a été détérioré pendant la guerre de 1940-1944. par des éclats d'obuts.

S'il n'y a pas eu de couvent à Haussonville, ni de cloître (comme le laisse penser le GAEC du même nom), la vie religieuse à Haussonville a été très intense entre le 15e et le 20e siècle.  Les seigneurs  y ont laissé leur trace, mais ne l'ont pas enrichie ; le patrimoine religieux a essentiellement été entretenu par les curés eux-mêmes et par la communauté de croyants.

 Aujourd'hui, seule l'église résiste encore à l'abandon et veille  sur le cimetière.

Eglise vue du cimetière
photo J. Blanchart



Pour en savoir plus :
Qu'est-ce qu'une collégiale et un chapitre de chanoines ? Voir l'article de Wikipédia
Mémoire de l'abbé Paquatte
Sur l'orthopédiste François-Xavier Tétard
Sur la maison "Hinzelin"
et de nombreux articles sur les églises d'Haussonville et Domptail à retrouver en consultant la liste des articles de mon blog : enpassantparhaussonville.fr ou en faisant une recherche par mots-clés (bandeau de droite)
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Document collecté après la rédaction du présent article

A propos du presbytère appelé le Pavillon
En 1892, des manoeuvres militaires importantes avaient lieu autour d'Haussonville. Le Général Galliffet, inspecteur d'armée, était logé au Presbytère. C'est le Curé Raimbault qui était alors le desservant.
Voici le commentaire des correspondants de presse sur le salon du presbytère.

Est Républicain du 15 septembre 1892